Hugo Victor – Histoire d’un crime (tome 1)

Hugo Victor – Histoire d’un crime (tome 1): Comme l’indique son sous-titre, Histoire d’un crime est moins un essai historique au sens traditionnel du terme que la Déposition d’un témoin. Ce témoin, c’est bien sûr Hugo lui-même, qui a participé aux événements qu’il relate. À partir de notes griffonnées sur le vif, l’auteur d’Hernani et de Notre-Dame de Paris nous livre en effet un récit alerte et « saignant de réalité », un récit où le « nous » et le « on » alternent avec un « je » qui se fait tour à tour acteur, témoin, juge d’instruction et greffier (Hovasse, 30 et ss). Le crime dont il est question est le coup d’État du 2 décembre 1851 qui sonne le glas de la Deuxième République (1848-1852) et conduit à la proclamation du Second Empire (1852-1870). L’auteur du crime est nul autre que le médiocre neveu du premier Bonaparte : Louis-Napoléon Bonaparte, le « Prince-Président » de cette fragile république née de la Révolution de 1848, une république dont il a solennellement juré de défendre la constitution mais qu’il finira par trahir en s’arrogeant le titre de Napoléon III.

À l’époque, Hugo est académicien, pair de et chef de file du Romantisme. C’est un auteur engagé qui s’occupe déjà de politique, mais à partir de 1849, il devient représentant du peuple à l’Assemblée nationale –un rôle qu’il prend très au sérieux. Bien qu’officiellement élu à droite, il vote de plus en plus à gauche, mettant toute son éloquence de tribun à combattre la misère du peuple, la déportation et l’esclavage. Il soutient également l’éducation laïque et la liberté de la presse, toutes deux menacées par la droite parlementaire. En implacable observateur de la scène politique, il dénonce ouvertement le cynisme du gouvernement ultraconservateur et fustige publiquement les basses manœuvres de Louis-Napoléon qui cherche par tous les moyens à prolonger son mandat présidentiel pour s’octroyer peu à peu les pleins pouvoirs, au mépris de la constitution. Au début de 1851, l’ime politique est telle que la s’attend d’un jour à l’autre à un coup d’État… qui ne vient pas, au point que plus personne n’y croit. Lorsqu’il éclate enfin, dans la nuit du 1 au 2 décembre, tout va très vite : l’Assemblée législative est dissoute, le Conseil d’État et la Haute Cour sont supprimés, les cafés et les imprimeries fermés, les journaux interdits. Catapulté par les événements au cœur même de l’action, Hugo se retrouve à la tête d’un comité d’insurrection qui tente d’organiser la lutte contre l’usurpateur. La résistance ne tiendra que cinq jours. Elle se soldera par la défaite cuisante de l’opposition républicaine, forçant Hugo à s’enfuir à Bruxelles le 11 décembre 1851. Le 9 janvier 1852, il sera officiellement expulsé de avec 65 autres représentants du peuple.

À sa sortie en octobre 1877, ce premier tome dans lequel l’auteur fait revivre les événements des deux premières journées du coup d’État (1 et 2 décembre 1851) est immédiatement salué par une critique enthousiaste : « M. Victor Hugo peint cela avec sa puissance d’évocation, son style sobre, nerveux, taillé et comme sculpté dans le granit — [un] style […] unique d’énergie, d’ironie mordante, luisant et tranchant comme une épée […] où, sous la tragédie, court une verve de comique incomparable. » (Bérard-Varagnac, Le Journal des débats, 13 octobre 1877 ; voir les annexes du Tome II.)

[Sources : Jean-Marc Hovasse, « Préface », Histoire d’un crime. Déposition d’un témoin (La Fabrique Éditions 2009) ; Frank Laurent, Victor Hugo : Espace et Politique (Presses universitaires de Rennes, 2008) ; Yves Gohin, Victor Hugo (PUF 1987).]

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